Quelques imprévus

C'est au restaurant "Chez Goofy" à Alma que l'on retrouve finalement, après un silence de quelques semaines, le jeune Aldo Antonnelli, en train de savourer la réputée poutine de l'endroit. Véronica Puglisi est assise devant lui, buvant à rythme lent un simple verre d'eau, et visiblement dégoûtée par l'image d'Aldo, s'empiffrant littéralement.

Aldo - Ça fait presqu'un mois, déjà. Il était bien temps que je trouve quelque chose qui me plaise au Canada!

V.I.P. - Pour débuter, ne pourrais-tu pas au moins essayer de conserver une image correcte de toi? Ta dignité, par exemple?

Aldo se lève la tête et regarde Véronica, un long filet de fromage fondu reliant ses lèvres à son assiette.

Aldo - Ce n'est pas toi qui a vécu toute la misère, depuis le début de cette aventure. C'est moi qui subit les attaques sauvages, ici!

V.I.P. - Hé, abruti! T'avancerais-tu en terrain glissant? Personnellement, j'ai l'impression que oui.

Aldo - Quoi encore? Merde! Je croyais que je venais en Amérique pour une mission glorieuse, celle de combattre auprès des plus grands guerriers, pour l'honneur, pour la famille, pour notre fierté!

V.I.P. - L'honneur et la fierté ont fuit lorsqu'ils t'ont vu manger ta saloperie de poutine. La famille pourrait suivre. Regarde ce qui se passe, maintenant! Tu es descendu si bas que tu dois combattre contre des marionettes.

Aldo - C'est ce kaudertype que j'affronte?

V.I.P. - C'est bien de voir que tu te tiens au courant, principalement parce que...

Aldo (interrompant Véronica) - Il a l'air d'un chic type! Un peu zélé, mais tout de même...

V.I.P. (visiblement frustrée d'avoir été interrompue) - Je disais donc que tu devrais être au courant, principalement parce que...

Aldo (interrompant encore une fois Véronica) - Non mais! Il m'a l'air brillant! À la fois machiavélique et sensé. Il sait ce qu'il faut avoir pour se rendre au...

BANG!!!

V.I.P. (frappant la table de son poing) - PRINCIPALEMENT PARCE QUE JE T'EN AI PARLÉ TOUS LES SOIRS DEPUIS PRESQUE DEUX SEMAINES, SALE SOT SANS CERVELLE!

Aldo semble alors légèrement intimidé, devant la colorée Italienne, devenant presqu'aussi rouge que sa tenue. Il savait qu'elle pouvait être maline. Pas au point de lever le ton, par contre. Et surtout pas au point de frapper la table si fort que sa poutine volerait sur sa chemise, comme cela venait d'être le cas.

Aldo - Voyons, calme-toi poulette!

PAF!!!

Personne n'aura eu le temps de la voir venir. C'était rapide, comme un réflexe, comme si elle prévoyait déjà le coup. La joue d'Aldo ne mit pas beaucoup de temps à rougir, non plus. Aussitôt, Véronica replaçait son gant.

Aldo - Ouais, bon, ça va, j'ai compris...

V.I.P. - Cela fait maintenant près d'un mois que je te le répète, et tu continues de me prendre à la légère. Essaie donc d'être sérieux pour une fois, le gosse! Tu as du pain sur la planche: d'abord de venger cette attaque vicieuse que tu a reçu la semaine dernière, et surtout de démontrer ce que tu peux faire ici. Car jusqu'à présent, tu te comportes et te débrouilles comme une nouille crue.

Aldo - Dis donc, c'est assez les insultes! Je voudrais bien t'y voir.

V.I.P. - Tu ne me connais pas, Aldo.

Aldo - Oh oui, madame. Je commence à avoir une bonne idée de votre petit caractère de sorcière.

V.I.P. - C'est un caractère comme celui-là qui m'a amené là où je suis. Et crois-moi, tu ne veux pas te retrouver dans un ring face à moi, petit bourgeon. Je sais en quoi consiste ce sport.

Aldo - Je voudrais bien t'y voir fillette.

V.I.P. - Tu m'y verras bientôt, puisque j'aurai peut-être finalement l'occasion de venger la mort de mon coéquipier nippon. Je cherche vendetta depuis des lunes, voici que l'assassin se tient debout au milieu du cercle, sous l'immense poutre de béton tenue par une simple corde. Et c'est moi qui tient le canif.

Aldo - T'as bientôt terminé avec ton charabiat de métaphores incompréhensibles?

V.I.P. - Va falloir que tu t'y habitues, Aldo. Mon oncle m'a demandé de veiller sur toi, je n'ai pas l'intention de le décevoir. Même si parfois, j'aurais bien envie de te laisser aller et de te voir t'écraser la figure dans la boue.

Aldo - Merci, c'est gentil.

V.I.P. - T'inquiètes pas, chou-fleur. Je ne le ferai pas. Ce que mon oncle demande, mon oncle l'obtient. Et je ne sais trop pourquoi, mais il a tes succès à coeur. Il serait peut-être bon pour toi de commencer à le satisfaire, d'ailleurs.

Aldo - J'en ai bien l'intention, dès cette semaine. Et ce ne sera pas un accident.

V.I.P. - L'accident implique le hasard, et il n'y a pas de place au hasard. Cette semaine, c'est la Vendetta.

Aldo commence enfin à enlever les frites, la sauce et le fromage de sur sa chemise.

Aldo - Heureusement, il n'y a pas de Vendetta pour cela.

V.I.P. - Dommage. J'aurais bien aimé toucher ton corps...

Aldo lève alors un sourcil.

V.I.P. - ... pour le tordre dans toutes les directions, bien sûr.

Le jeune homme détourne alors son regard.